Homélie du samedi 5 mars 2016 à Poigny-la-Forêt – (Michel Calot)
Ce passage de l’évangile de Saint Luc, couramment appelé « Le Fils prodigue » ne met pourtant pas l’accent sur la vie dissolue du fils, et je vous propose de regarder d’abord la figure du Père.
Cet évangile pourrait porter plusieurs noms, par exemple « Le Père généreux, Le Père qui laisse libre, Le Père qui attend, Le Père qui pardonne » ou encore, « le fils jaloux »… Nous n’avons que l’embarras du choix, suivant l’orientation que nous avons envie de donner à la méditation de ce texte … Oui, c’est un beau texte, riche, dense, dont nous ne ferons jamais le tour, et qui nous invite à nous identifier tour à tour au Père, au fils aîné ou au fils le plus jeune ! Comme nous sommes dans l’année sainte de la Miséricorde, regardons aujourd’hui le Père… mais nous aurons à cœur aussi de regarder les deux fils, auxquels nous pourrons aussi nous identifier.
Bien sûr, ce Père de la Parabole est la figure de notre Dieu que Jésus nous donne à contempler à travers cette histoire.
Méditer sur la miséricorde de Dieu à partir de ce texte, c’est à la fois trop facile et trop difficile… Trop facile parce que c’est presque trop évident, mais difficile parce qu’il y a dans cette parabole beaucoup de choses cachées qu’il nous faut découvrir, et que nous ne découvrirons qu’en nous plongeant et nous replongeant dans la Parole de Dieu.
Alors, je vous propose de regarder un peu les qualités du Père de la parabole, image de notre Père du ciel.
Un Père qui est généreux, qui fait confiance, même à ce fils qui revendique son autonomie. Il n’y a pas de condition à l’Amour de ce Père… « Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient »… Et le Père donne. Mais l’usage que fait le fils de ce qui lui revient ne le conduit pas à la fortune ni au bonheur, il conduit à la mort. Et tout chemin qui conduit à la mort n’est pas le chemin du Père qui nous veut vivants. Je ferai donc mienne cette question : Comment entrer et rester sur le chemin de vie et d’Amour de Dieu notre Père… ?
Un Père qui laisse libre, et qui n’a pas d’autre projet sur nous que notre Salut et notre bonheur. Il fait confiance, il laisse chacun faire selon ses désirs, quitte a se laisser berner par notre malice… En nous laissant libres, il nous rend responsables, de nos actes comme de leurs conséquences… Alors, je fais encore mienne aussi cette question : Comment entrer et rester dans cette liberté offerte par Dieu notre Père ? Car il est si facile de se fourvoyer !
Un Père qui attend, qui attend patiemment que son enfant revienne et que ce soit son choix de revenir, un choix pas forcément guidé par une raison noble, mais un choix guidé par la confiance en ce Père auprès de qui finalement il n’était pas si mal ! Alors comment revenir à Dieu notre Père, sinon en nous reconnaissant tout petits devant lui ? Comment profiter de sa patience sans le lasser ?
Un Père qui pardonne, et dont la miséricorde est sans limite pour celui qui s’est éloigné de lui pour vivre selon ses fantaisies et qui s’est fourvoyé dans le péché. Ce fils que nous sommes parfois, sinon souvent, et dont le retour est tant espéré ! Ce fils qui est invité à se convertir et à accepter d’être pardonné, ce fils qui regrette d’avoir quitté, ne serait-ce qu’un instant, le chemin de l’Amour… un Père qui cherche à nous réconcilier avec lui ! Un Père qui attend patiemment celui qu’il aime et de qui il veut être aimé ! Alors, je fais mienne encore cette question : Comment entrer et rester dans ce pardon offert par Dieu notre Père ?
Généreux, Respectueux, Patient, qui pardonne, c’est le nom de notre Dieu et ce nom se résume en un seul mot, Miséricorde.
Le cadeau que Dieu nous fait et que nous sommes invités cette année à accueillir tout spécialement, c’est son pardon. Un pardon toujours offert, un pardon sans limite, un pardon sans retour et sans condition, ou plutôt, un pardon dont la seule condition pour le recevoir est de l’accepter. Pour cela, Dieu nous propose de cultiver un qualité essentielle, l’humilité ! Alors, nous comprenons combien cela est difficile, exigeant, et jamais acquis une fois pour toutes. Il nous faudra demander au Père de nous faire vivre l’humilité pour vivre de sa Miséricorde.
Jésus qui s’est fait pour nous péché, qui a été trahi, arrêté, frappé et tué nous montre ce chemin d’humilité… et le Père nous offre l’exemple parfait à suivre, ce Christ Jésus qui nous dit « soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux ». Que Dieu nous met la barre bien haut, mais aussi, quelle confiance nous fait-il pour nous croire capables d’être comme lui ! L’Église nous invite donc pendant cette année à approfondir ce mystère de la Miséricorde, en essayant de la mettre en pratique par les œuvres de Miséricorde. Recevoir la miséricorde de Dieu aujourd’hui, peut se traduire par le Sacrement de la Réconciliation, demandé, reçu et accepté… même si cela est humiliant. Pratiquer la Miséricorde aujourd’hui, c’est accepter de suivre le chemin de Jésus, le chemin du pardon envers ceux qui nous ont blessés, ou nous ont fait du mal. Pardonner est aussi difficile que de demander pardon…
Mais peut-être oserons-nous penser, nous les croyants de souche, que nous ne sommes pas comme le fils prodigue… Alors peut-être sommes-nous comme le Fils aîné. Dieu n’est-il pas trop bon de pardonner comme cela, si facilement à ceux qui sont loin de lui ? Et nous, nous aimerions plus de justice car nous sommes fidèles, … à la messe du dimanche, à la prière matin et soir, nous donnons à la quête, nous faisons ou nous avons fait le catéchisme, que sais-je encore, nous avons tant fait pour Dieu !!! Comme le Pharisien de l’Évangile… qui lui au moins, remerciait Dieu de ce qu’Il lui avait donné ! Nous, retournons donc à la Parole de Dieu pour découvrir cette merveille que fit pour nous le Seigneur, prions pour que la Miséricorde du Père nous soit accordée généreusement et que nous la recevions comme le don le plus beau puisque la Miséricorde, c’est la nature même de notre Dieu. Amen.
NB : Vous trouverez ci-dessous la version téléchargeable de cette homélie